Party don't stop (pv Satoru.)

La fin de l'année approchait à grands pas. En Mars, nous aurons les examens finaux. Et comme chaque fois, je suis stressé et angoissé comme un dingue à l'idée de me louper. Je sais, c'est complètement stupide... Je suis intelligent et bosseur, on me l'a toujours dit, et je n'ai jamais redoublé ou même eu une note en dessous de la moyenne. Mais c'est plus fort que moi. Quand l'année se termine et que les examens approchent, j'ai toujours une boule qui me creuse l'estomac... Alors je prends quelques antistress en espérant ne pas me faire d'ulcères inutiles avant même d'avoir réellement mis les pieds dans le métier de médecin. Les écouteurs dans les oreilles, j'ai les cours enregistrés qui tournent en boucle pour mieux les mémoriser. Le plus compliqué dans les études de médecines, c'est que vous n'aviez jamais fini d'étudier. Il y'avait toujours tout un lot de choses à apprendre, encore et encore, et même une fois diplômé et dix ans d'expérience à la tête d'un hôpital, vous n'étiez jamais au bout de vos surprises. La santé est un domaine qui ne cesse d'évoluer, changer, se transformer, et le corps humain est palpitant car dans le fond, on ne sait jamais à 100% comment est-ce qu'il peut réagir.

Alors que je marchais dans les couloirs de l'université, les mains dans les poches concentré dans le cours enregistré, la tronche de Yukio me traverse l'esprit. Instinctivement, je m'arrête et prends mon téléphone question de voir s'il m'a contacté. On se voyait très peu depuis que nous avions commencé nos études spécialisées. C'était naze de moins le croiser et rigoler avec lui. Me disputer aussi. Car nous avons tous les deux de bons caractères bien trempés et qu'en toute logique, oui, il peut arriver que quelques fois ça parte un peu en couilles. Mais bon, on s'aime quand même, même si on ne se le dit jamais. Bref, entre les programmes différents de nos spécialités respectives, les révisions interminables, la fatigue et les prises de services d'internes à l'hôpital... On se croisait de moins en moins et c'était dépitant. Je rangeais mon téléphone et décidais d'aller tout de même jeter un oeil sur le toit. En général, quand il voulait se poser un peu, il adorait s'y allonger en paix. Je n'ai jamais compris d'où lui était venu cette manie, à trainer sur les hauteurs tel un gros oiseau. Parfois on dirait presque un matou au sommet de son arbre à chat, contemplant fièrement son territoire. Je ne pu retenir un rire à cette idée.

Et bingo, monsieur était là en train de se dorer la pilule, un bouquin posé sur lui. Dans le fond, quelque part, j'étais un peu vexé. On ne se voyait presque plus sérieux. Il pouvait au moins m'envoyer un petit message pour me dire quand il était libre, question de réviser ensemble ou boire un verre... Enfin, c'était peut-être moi qui en faisait trop, je sais que je peux dépasser les bornes quelques fois. Je m'approchais de mon vieil ami, lui gâchant le plaisir du soleil par plaisir et lui offrant l'ombre de ma présence à la place. Je ne sais pas ce qui me retient de pousser sa tête brutalement en lui reprochant de me délaisser comme un chien abandonné et de préférer le soleil en solitaire à moi. Ah oui... La possibilité de déclencher une cinquantième dispute. Alors je garde tout pour moi, même si je ne peux cacher la déception sur mon visage.

- Yo, lançais-je avec un sourire en coin. Ca va pas trop fatigué ? Oh si certainement, tu dois être terriblement épuisé, tellement qu'il a dut être très compliqué pour toi de prendre ton téléphone et de m'envoyer un petit message juste pour me faire signe que tu es disponible et à l'université aujourd'hui.

Oups. C'était sorti. Je l'avais pourtant bien dissimulé dans un coin où je stockais mes émotions concons et stupides, mais, les mots avaient traversés ma bouche sans passer par la douane, et ils étaient sortis de la manière la plus sèche qui soit. Je me mords la lèvre, regrettant d'avoir balancé ça, puis retire les écouteurs dans mes oreilles.

- Désolé, ça va. C'est sorti tout seul...

Je croisais malgré tout les bras pour montrer mon mécontentement. Oui, ça faisait gonzesse, j'avoue, mais rien à foutre. J'ai toujours plus ou moins été comme ça avec lui. Il est l'un de mes amis les plus précieux aujourd'hui, alors... J'en sais rien, quelque part, la médecine c'est très prenant. Et même si on avait accroché tous les deux sur ce boulot, parfois, j'avais un peu peur qu'on s'éloigne loin de l'autre et qu'on finisse par se perdre. Bien sûr je ne le dirai jamais... J'ai bien trop de fierté pour ça. Je m'assieds près de sa tête et lui piqua son livre pour en regarder le contenu.

- Voilà donc le truc avec lequel tu me trompes.

Oui je sais. Je suis irrécupérable.

"Oh lâche moi veux-tu." Ca y'est il réagissait enfin. Je ne suis pas étonné par ce ton agacé d'ailleurs, on peut dire qu'avec la façon dont je l'ai salué, je pouvais m'y attendre. Je tourne les pages de son bouquin, sans vraiment le lire et écoute ses arguments. "Désolé, mais j’ai éteint mon portable. Parce que j’évite cette fille. Tu savais que le grand sensei a eu la bonne idée de lui proposer d’interviewer les meilleurs élèves de chaque filière et bien sûr il a fallu que ça tombe sur moi. Elle pose des questions bien trop personnelles à mon goût. " Je lève les sourcils sans le regarder puis roule des yeux. Cette fameuse fille dont il parle, je ne mets pas de temps à deviner qu'il s'agit de ma soeur. Une petite fouineuse qui se mêle de ce qui ne la regarde pas, et qui serait capable de faire des pieds et des mains pour avoir les informations les plus croustillantes possibles... Je vous présente Watanabe Noriko, la chipie par excellence. Si elle devait avoir une devise, ce serait probablement "Tout pour faire chier" ou quelque chose dans le genre.

Premièrement, qu'est-ce que c'était que cette histoire d'abord ? Elle devait choisir les meilleurs élèves de l'université pour les interviewer, d'accord. Mais pourquoi elle pensait à Yukio et pas à moi ? Moi aussi je suis un bon élève hey ! Pff... Je suis prêt à parier qu'elle ne viendra même pas me parler de son projet. Je devrais lui en tenir deux mots. "Oui, je te trompe avec Haruki Marukami." Je préférais lui éviter de lui lancer le barda de ce que ce type avait de plus que moi pour qu'il fasse le choix de me tromper avec. De toutes façons, moi aussi je pouvais le tromper quand j'en avais envie, na. Des amis j'en ai plein ! Bien qu'il soit l'un de mes favoris. "Maintenant que tu es là. Qu'est-ce que tu veux qu'on fasse ?"

- Pourquoi Noriko est venue te voir toi au lieu de moi pour cette interview ? J'espère pour elle qu'elle me contactera aussi juste pour lui refuser ça au nez. Je suis un super étudiant moi aussi non mais oh.

Je posais le livre à côté et dérangeait frénétiquement mes cheveux avant de les recoiffer correctement.

- Si c'est Watanabe Noriko dont tu me parles, sache que c'est ma sœur et tu fais bien de t'en méfier. Elle est très maline, elle peut faire cracher n'importe quoi à n'importe qui. Une journaliste en herbe quoi. Mais si tu veux une petite astuce, ma famille cherche à la marier en ce moment, alors si elle commence à te poser des questions bizarres sur ta vie privée, demande lui quand est organisé son omiai, ça la fera redescendre en moins de deux.

Je ponctuais ma phrase par un grand rire. Bon c'était pas très gentil de me foutre d'elle par rapport à ses histoires de mariage arrangé, mais ça va, c'était bon enfant. Puis aussi, quand elle avait l'opportunité de m'agacer je peux vous garantir qu'elle ne perdait pas une seule seconde celle-là. D'ailleurs... Je jetais un regard soupçonneux sur mon ami, reprenant un air bien plus sérieux.

- Et, fais gaffe aussi. C'est ma petite sœur.

Je le connaissais très bien. J'allais pas mentir : Yukio était beau, charismatique, intelligent, bref il avait tout pour plaire et je savais que plusieurs filles se damneraient pour un pauvre baiser de sa part. Je ne voulais pas qu'il mette ma sœur, consciemment ou par accident, dans ses filets...

- Elle a beaucoup de caractère mais je ne veux pas qu'après l'interview elle se mette à coller des photos de toi sur les murs de sa chambre... Alors, fais gaffe à ce que tu fais avec elle hein.

"Je te laisse ma place avec grand plaisir. À croire que je dois être un peu plus intelligent que toi." Lui plus intelligent, la bonne blague. Il est vrai qu'après les sept premières années de médecine et le diplôme en poche, j'ai beaucoup hésité entre me spécialiser dans la chirurgie et la pédiatrie. J'ai toujours été passionné par les deux, alors j'ai finis par faire mon choix après beaucoup de temps sur le terrain. Les enfants malades et mourants, leur visage terni et leurs yeux réduits à néants à cause des médicaments quotidien, ça avait fini par me convaincre. Je voulais aider les nourrissons, les tout petits, qui n'avaient strictement rien demandé à la vie et se retrouvaient déjà si tôt dans le combat difficile et presque perpétuel qu'était la maladie. Sans compter le petit Mika, 5 ans seulement, leucémie très avancée, mort dans mes bras pendant mon service d'interne. C'était la première fois que je voyais un enfant mourir en dehors de la télé. Je crois que j'ai pleuré pendant deux semaines après ça, dont deux fois devant Yukio. J'avais donc choisi la pédiatrie. Et parfois, quand j'avais quelques questions ou que je voulais juste parler de chirurgie, j'en discutais avec Yukio. Il deviendra un super chirurgien, j'en suis certain. J'espérais que plus tard on se retrouve à bosser dans le même hôpital, même dans des pôles différents on trouverai bien quelques minutes ne serais-ce que pour déjeuner ensemble, ou se parler des nombreuses vies que nous avons sauvé le mois dernier. Aaah, je m'y vois déjà, Watanabe Satoru, Pédiatre en Chef !

"Quoi, je suis choqué que ça te gênerait tant que ça que je sois ton beau-frère. A moins que tu aies peur que je te fasse trop d’ombre. Après tout, je suis meilleur que toi." Ah ouais...? Ok, là Monsieur voulait piquer, très bien, jouons un peu. Avec le temps, il savait pertinemment qu'il se dressait contre un terrible adversaire, héhé.

- Hé, je suis sérieux, ne t'approche pas de ma petite sœur.

J'avais pour habitude de laisser Noriko tranquille, du moins, de ne pas m'occuper de ses affaires. Je n'étais absolument pas le style de frère collant et protecteur, qui voulait savoir où elle se trouvait et à quel mec elle parlait. Noriko était une grande fille, elle savait dire oui et non de façon censée à ce niveau là. Enfin c'est ce qui me semblait ! Mais là, hmmm. Je ne sais pas, je suis pas très à l'aise à l'idée de la savoir seule à interviewer Yukio. Peut-être parce qu'il était mon ami, ou que je le connaissais assez bien pour savoir que n'importe quelle fille pouvait tomber sous son charme.

- Je sais que tu as une très jolie petite sœur et je me ferai un plaisir de lui faire un petit coucou si tu fais quoi que ce soit à la mienne...

Je faisais un petit clin d'oeil, car oui il y'a longtemps, il m'avait déjà montré sa sœurette en photo. Je n'ai pas la moindre idée de comment elle s'appelle ni même ce qu'elle fait dans la vie, Yukio et moi n'avons jamais vraiment parlé de nos familles respectives. Évidemment, je n'irai jamais tourner autour de sa soeur, je ne saurais même pas où la trouver, mais hey ho, il fallait bien que j'ai un petit moyen de pression quelque part !

- Et pour finir, personne ne peut faire d'ombre au Soleil, ajoutais-je en passant une main dans mes cheveux. Tu es peut-être bon dans ta filière, mais moi plus tard je sauverai des enfants et peut-être même les tiens !

Je ne souhaitais en aucun cas que ses enfants soient malades bien sûr. Mais un petit sourire naquit sur mes lèvres :

- Quand tu seras Papa, tu me choisiras comme Pédiatre pour tes gosses, hein ? Personne ne pourra en prendre plus soin que moi !

C'était automatique, depuis que j'ai rejoins la spécialisation Pédiatrie, je harcèle mes potes en leur faisant promettre d'emmener leurs enfants chez moi, je veux être leur docteur pour la vie. Ce serait ma petite fierté à moi. Et la leur aussi !

- N'oublie pas que c'est dès la naissance, on attend pas qu'un enfant soit malade pour l'emmener voir un pédiatre ! S'il y'a un problème il faut le repérer le plus tôt possible.

"Crois-moi, je serais plus que ravie que tu sortes avec ma petite sœur. Elle ne pourrait pas trouver un mec que je respecte le plus. Le problème c’est que pour que tu lui demandes de sortir avec toi. Il faudrait que tu rentres dans un bar d’hôtesse. Te sens tu prêt à affronter une nouvelle fois les yakuzas." J'avoue, j'étais un peu surpris par sa réaction, moi qui pensais que ça le piquerait, cette idée de tourner autour de sa soeur. Apparemment il n'y a que moi que ça embête, cet ami qui étrangement se rapproche de votre soeur ou cousine comme si de rien n'était. Mais quelque part, j'étais aussi quelque peu touché. Nous étions amis depuis un moment, nous nous connaissions assez bien et nous savions que nous pouvions compter l'un sur l'autre depuis le temps. Mais de là, dire que je suis le mec qu'il respecte le plus... J'avoue, je le prend plus comme un véritable honneur plutôt qu'une simple preuve d'amitié.

Puis la suite de ces propos a le don de m'étonner. Sa soeur dans un bar à hôtesse ? C'était une blague ? Je grimaçais, cherchant à comprendre. Si j'étais prêt à retourner dans ce genre d'endroit, certainement pas. Mon agression d'il y'a trois ans m'avait bien convaincu de ma première idée sur Shinjuku et particulièrement Kabucki-chô : c'était le repère de personnes hypocritement dangereuses. Pour rien au monde je n'y remettrai les pieds. Instinctivement, je posais ma main sur la grande cicatrice qui se trouvait à mon avant bras droit. Elle était immonde et je l'aurais toute ma vie. Je me souviendrais toujours de la quantité de sang que j'ai perdu ce soir-là, ce connard m'avait littéralement ouvert les veines avec son coup de couteau.

"Premièrement, il faudrait la future madame Takahashi, ce qui n'est pas dans mes intentions immédiates. Puis, ensuite on verra si tu es l’as des pédiatres alors oui." Je roulais des yeux. Quel as des pédiatres ? S'il fallait que je kidnappe ses enfants pour m'en occuper ce n'était pas un problème pour moi. Mais je revenais à ce qu'il avait dit quelques secondes avant :

- Ta soeur dans un bar à hôtesses ? C'est une blague, qu'est-ce qu'elle fiche là-bas ?? Pourquoi tu ne vas pas la chercher ??

C'était ça le pire, c'est qu'il en riait ce type. Quel frère serait heureux de savoir sa soeur entourée d'hommes, les poussant à boire et stockant leur argent en échange de combler leur solitude ?? Sérieusement, les hôtes et hôtesses étaient des escrocs de la pire espèce. Je ne pouvais pas croire que Yukio soit aussi tranquille avec ça.

- Mec, réveille-toi, quel âge elle a déjà ?? Si ça se trouve elle travaille pour des personnes bizarres, tu devrais lui dire d'arrêter ça !

Mon ami me regardait étrangement. Le visage rieur qu'il avait encore il y'a quelques secondes s'était soudainement dissipé, ce qui me plongea dans l'incompréhension. Il semblait comme brusquement grisé, assombrit. Que se passait-il ? Avais-je dis quelque chose qu'il ne fallait pas ? Il se leva et s'éloigna vers le bord du toit, tandis que je haussais les sourcils, cherchant à discerner ses gestes. "Je sais, mais ma sœur est majeure. Elle a suivi les traces de sa mère. On a tous essayé avec mon frère, mais elle est tellement têtue." Elle a suivi les traces de sa mère ? Comment ça ? Il me semblait que sa mère était décédée et je doutais fort qu'elle aie été hôtesse tout en s'occupant de ses enfants tout de même.

Si Yukio était une tête, ses frères et soeurs devaient l'être aussi. Bon, il est vrai que ce n'était pas uns science exacte ce truc là, mais je voyais mal Yukio être le seul petit génie comparé à ses frères et soeurs. Chez moi, on avait tous une certaine intelligence, mon frère ainé était certainement le meilleure, et ma petite soeur pour sûr la moins douée, bien qu'elle tâchait de se défendre. Yukio se tourna vers moi et continua : "Un jour, j’arriverais à lui faire entendre raison. Pour le moment, elle essaye juste de punir notre père." Dans le fond, j'étais en train de réaliser une chose. C'était peut-être surprenant que cela me traverse l'esprit que maintenant... Mais en fait au final, après neuf ans d'amitié environ et beaucoup de temps passé ensemble, je réalisais que je ne savais rien, strictement rien de la famille de Yukio. Il ne me parlait jamais d'elle. Je ne le faisais pas tant que ça non plus, mais il savait ce que faisait mes parents, où ils vivaient et tout ce genre de choses. Mais alors Yukio... Excepté sa mère décédée, je ne savais rien d'autre. Lui dans cette université prestigieuse qu'est Todai avec un avenir de chirurgien, sa soeur croupissant dans un pauvre bar à hôtesses... Tout ça pour punir son père ? Tout ceci me donnait envie d'en savoir plus.

Je me levais les mains dans les poches et m'approchait de lui.

- En y réfléchissant je ne connais même pas ta famille. Tu ne m'as jamais parlé de ton jumeau, et j'ai à peine vu une photo de ta soeur sans en savoir plus. Pourquoi est-ce qu'elle veut punir ton père ? Personne ne va dans un bar à hôtesse pour punir sa famille !

C'était quand même bizarre ! Les conflits dans les familles, il y'en avait toujours, tout le monde le savait. Mais bosser dans un bar pour vengeance, n'étais-ce pas un peu stupide ?

- Pourquoi elle veut se venger de lui, ils se sont disputés ? Et il sait qu'il bosse là-dedans ? D'ailleurs, tu es toujours en contact avec lui ? Tu ne m'as jamais parlé de lui. Qu'est-ce qu'il fait dans la vie ?

"Ou là doucement avec tes questions, tu vas m’étouffer et t’étouffer par la même occasion. Écoute, je te répondrais à certaines, mais d'autres, je ne suis pas encore capable d’en parler complètement." Je haussais un sourcil. Comment ça il n'était pas capable d'en parler ? Etait-il arrivé certaines choses marquantes dans sa vie que j'ignorais ? Hm... Ce devait être ça. Mais si c'était le cas... Pourquoi ne me l'avoir jamais dit...? Il savait des tas de choses de moi, voire tout. Le problème que j'avais avec la nourriture, c'était certainement ce que je gardais de plus intime. Mon surpoids quand j'étais petit, l'anorexie que j'ai ensuite frôlé en début d'adolescence, et les difficultés que j'ai aujourd'hui à gérer mon atroce gourmandise. Il avait même fini par comprendre, sans pour autant que je lui avoue, que j'étais tétanisé face à un chat... Alors pourquoi je n'étais pas au courant moi aussi de ce qui avait put arriver dans sa vie ???

"Pour commencer, mon père a eu deux femmes et une maîtresse qui travaillait dans un bar à hôtesse. Sa première femme lui a donné des filles qui sont mes grandes soeurs. Je n’ai jamais vraiment vécu avec elles. Donc je suis incapable de te dire ce qu’elles font dans la vie. Ensuite, ma mère avec qui il a eu mon frère et moi. Après, pendant qu’il était avec ma mère, il a eu sa maîtresse et lui a fait un enfant, ma petite sœur. Il ne s'est jamais vraiment intéressé à elle. Voilà pourquoi elle veut le punir." Ah d'accord... On avait là un Monsieur qui avait un peu de mal à garder son artillerie dans son pantalon, et ça avait fait des dégâts. Je grimaçais en continuant de l'écouter, l'observant s'assoir sur le petit mur : "Comme je t’ai dit plutôt. Ma sœur lui en veut de ne pas s'être occupé d’elle. Oui, il le sait, c'est pour ça qu'il nous a demandé à Naoko et moi de lui faire reprendre raison. Ce n'est pas nous qu’elle veut punir, mais bien lui. A part quand mon frère me parle de lui, je n'ai pas vraiment de liens avec mon père. C’est un homme d'affaires, mais je ne sais pas dans quel genre d'affaires il travaille." Je pouvais lire en Yukio comme un vide, un fond d'une étrange tristesse. Il ne devait pas du tout être en bon terme non plus avec son père, vu qu'il n'avait quasiment pas de nouvelles de lui. C'est ainsi que je réalisais qu'entre sa mère décédée et son père pas vraiment là, à l'exception de sa grand-mère... En fait, il était seul !

- Je ne comprends pas... Pourquoi tu ne me l'as jamais dis tout ça ?

Je m'approchais doucement de lui et poussa sa tête, taquin.

- Je suis ton ami et tu gardes bêtement tout pour toi, pourquoi ? Ca se voit que tu as un problème avec ton père quand on voit ta tête là tout de suite.

C'était le genre de scénario que je ne connaissais pas, vous savez, celui des problèmes de famille. J'ai eu beaucoup de chance en naissant dans la mienne. Bien sûr il y'avait quelques fois des disputes, mais ça n'allait jamais loin et n'excédait pas une petite semaine. Alors ceux qui souffraient à cause de leur père ou de leur mère... Je ne pouvais qu'imaginer ce qu'ils devaient ressentir, mais me mettre à leur place, impossible.

- Tu lui en veux d'avoir trompé ta mère ? Ou de t'avoir laissé seul ? Vu comment tu en parles, j'ai pas l'impression que tu aies eu une relation constructive quand tu étais plus jeune avec lui.

Je m'asseyais à côté de lui et passais mon bras sur ses épaules.

- Je m'entends super bien avec mon père, donc je ne sais pas trop ce que c'est, mais plutôt que de rester comme ça, tu ferais mieux de m'en parler ! Et ce n'est pas en se saoulant dans un bar à hôtesses que ta sœur se rendra service à elle aussi.